Le restaurant La Paix à Anderlecht, dont l’histoire remonte à 1892, est fortement liée aux abattoirs d’Anderlecht. Le restaurant abritait autrefois une agence bancaire. Les maquignons et autres bouchers se ruaient une fois leurs affaires terminées pour déposer leur argent et se remettre de leurs émotions autour d’une bière ou la fourchette à la main. Un lieu important donc dans la mémoire collective. On retrouve encore dans la salle, des vestiges de cette période banque-brasserie.
Pendant des années on y mangeait du jambon Basque de chez Pierre Oteiza, sèché pendant 24 mois, des crevettes grises pelées en Belgique, du bœuf maturé, de la selle d’agneau du Limousin, du veau de lait de Corrèze, du porc noir de Bigorre, du poulet des Landes, des joues de porc Belge, des pieds de cochons, queues de cochon…
Il faut dire que le restaurant se trouve juste en face des abattoirs d’Anderlecht, ça aide.
David Martin est venu habiter à Bruxelles en 1995. Il est chef dans la cuisine du restaurant La Paix depuis novembre 2004. C’est en fait le restaurant familial de son épouse Nathalie. Originaire d’un petit village du Sud-Ouest de la France, né d’un père venu du Pays Basque espagnol et d’une mère Alsacienne, David Martin a beaucoup voyagé pour son travail.
A l’époque de la Brasserie de La Paix, David Martin définissait le sens du mot Brasserie par ses mots « C’est une cuisine de souvenir qui a su évoluer sans perdre de son identité première, la sincérité et la convivialité. De très bons produits sélectionnés avec soin, cuisinés avec amour, servis de manière informelle et souriante dans une ambiance d’amitié. Une brasserie ce n’est pas seulement un écriteau que l’on suspend à une façade, cela représente beaucoup plus. C’est avant tout un état d’esprit qui vise à réaliser une cuisine en toute honnêteté et sincérité. La recherche du produit de qualité supérieur est au centre de cette problématique » .
Mais tout ceci c’est du passé, David Martin le chef du restaurant La Paix, avec une 3éme toque et une note de 17/20 au Gault & Millaut ainsi qu’une étoile au Michelin, a décidé de bouleverser les codes. Devant la recrudescence des restaurants proposant des viandes maturées, las de voir ses clients gâcher des viandes d’exception avec une sauce béarnaise, après de multiples voyages au Japon, David Martin devient 平和を復元 (Restaurant La Paix en Japonais).
A commencer pas la salle, où trône en son centre, mille origami, selon la légende des mille grues. Une légende originaire du Japon, où l’origami est très pratiqué, qui raconte que si l’on plie mille grues en papier dans l’année, retenues ensemble par un lien, on peut voir son vœu de santé, de longévité, d’amour ou de bonheur exaucé.
J’ai été convié à vivre une expérience hors du commun chez David Martin par TheFork. Une initiation aux produits japonais préférés du chef étoilé de La Paix. Le fruit de ses explorations personnelles et interprétations culinaires.
Depuis quelques temps, David Martin collabore avec José Veys et Anne Bortels à la création d’un jardin potager à la ferme Nos Pilifs au nord de Bruxelles, ce qui lui permet de proposer des légumes de saisons, qu’il cueille lui-même. Il faut dire que le chef s’octroie un peu de temps libre, le restaurant n’est ouvert que le midi, et seulement un soir par semaine, et il fermé le week-end. Un chef s’associant à un jardinier, hummm j’ai deja vu ça quelque part (Sang-hoon Degeimbre L’air du temps) 🙂
Quand David Martin se rend au Japon, l’ambassadeur le reçoit à bras ouverts. Si la carte propose encore une côte de bœuf Simmental de la maison Lesage ou encore un Agneau de lait d’Aveyron, le chef a décidé de laisser libre cours à sa créativité avec par exemple comme aujourd’hui : sardines bretonnes marinées au vinaigre Kanisu, praliné végétal aux amandes avola (province de Syracuse en Sicile), jus de chou, coriandre, pomme et gingembre. Tout simplement magnifique.
Ou un rouget de roche marine au Sake-Kasu poché a l’huile d’olive noire et poudre de Sakura, pulpe de moule bouchot à l’Ume-Koshu (un condiment à la prune ume (29,65%) au piment vert (19,87%…).
Ou encore une huître gillardeau (Les Gillardeau sont élevées pendant quatre ans selon des règles strictes) gratinée aux champignons des bois, cresson de Laeken, Katsuoboshi (une préparation de bonite).
Chaque plat est un régal pour les yeux mais surtout pour les papilles.
Le restaurant La Paix est un des rares en Europe à proposer des King Crabs norvégiens bien vivants dans leur grand vivier qui trône à l’entrée de la cuisine. L’intérêt des King Crabes vivants, c’est de permettre des recettes Japonaises impossibles avec du surgelé.
En parlant de King crab, David Martin nous fait goûter un Chawanmushi (flan vapeur), avocat et sésame noir au Ponzu Zabon de Mr Sato. Une pure merveille.
Voir les chefs dans leurs cuisines c’est toujours pour moi un émerveillement.
Mais David Martin n’en a pas fini de nous surprendre, surtout avec ce Black cod (cabillaud) Saikyo-Miso, tarte fine de céleri confit au miso de Kyoto, dashi au laurier.
Puis Tricorne de thon blanc de pèche de ligne, anguille fumée Dashi vinaigré et Algues.
Suivi d’une Volaille de Bresse shio-koji, cuite au feu de bois, maïs/pomme de terre, Jus a l’huile d’oignon de Kyoto.
David Martin maîtrise à la perfection les cuissons et les assaisonnements, sa cuisine atteint des sommets.
Quand finalement arrive le dessert, un mille feuille de pommes « La clocharde », glace yubeshi, madeleines, gelée de vieux cidre et sabayon de vieux saké, financier chocolat, compotėe de coings cuite au foin, je me suis dis que j’étais dans un excellent restaurant Japonais.
La cuisine du restaurant La Paix est donc une cuisine vraiment hors du commun : des assiettes épurées, un dressage millimétré et une grande recherche dans les compositions.
Certains repas laissent un souvenir impérissable, inscrit à jamais dans la mémoire, c’était le cas ce jour au Restaurant La Paix. Merci ありがとう David Martin pour cette exceptionnelle journée, et merci TheFork.
Le restaurant sert une baguette qui provient de la Fleur du Pain, qu’il termine de cuire au moment de servir, pour moi qui suis fan de baguette, c’était magique.
Je dois aussi remercier le personnel de salle qui fait ici un travail extraordinaire. Nathalie, son épouse, pour sa patience, et l’équipe en cuisine.
Restaurant La Paix. Rue Ropsy-Chaudron 49. 1070 Bruxelles. Tel : +3225230958 http://www.lapaix.eu
Ouvert du lundi au vendredi, uniquement le midi, et le vendredi soir. Attention fermé le week-end. Et je vous conseille de réserver à l’avance.
Vous trouverez un lien en bas de page, sur le site TheFork pour télécharger l’application (Android/Apple)
Grace à TheFork, vous aurez la chance de pouvoir réserver le menu spécial 5 services, boissons comprises à 100€.
Petite vidéo réalisée au restaurant, écoutez David Martin expliquer sa passion et suivez le dans ses cuisines.
Et si vous avez encore 8 minutes et que vous souhaitez écouter la belle histoire de David Martin, vous trouverez ici une excellente vidéo. Il a des coucougnettes Mr Martin, chapeau bas.
Les photos de cet article qui portent le ©Carnets de Normann (BXL5) ont été prises par son auteur.
Bien sur le mieux aurait été de garder La Paix en tant que tel, et ouvrir un gastronomique un peu plus loin.
Mais la gestion de deux restaurants n’est pas des plus simples.
Je pense que David Martin souhaitait rester au contact des ses clients.
Mais je ne suis pas David Martin 🙂
Merci Normann pour ce reportage palpitant!
Pour avoir été à La Paix à plusieurs reprises, je comprends tout à fait cette fascination et l’émerveillement que cause la cuisine et le chef.
En même temps, de nombreux amis à moi ont été déçu de l’évolution de la Paix.
Je m’explique;
Avec mes amis, nous avions coutume d’aller à la Paix pour notre repas de fin d’année et il faut dire que la cuisine était généreuse, goûtue, riche, authentique. A chaque fois, un excellent souvenir… on faisait bombance.
Mais ça, c’était AVANT que David Martin ne parte à la quête de l’étoile. 😀
APRES, l’ambiance du resto a changé drastiquement (la déco de Charles KAISIN est un peu froide), un silence monacal y a remplacé les éclats de rire et le brouhaha d’antan, mais surtout, la cuisine s’est faite ascétique (ok c’est peut-être un peu dur comme mot, mais c’est le contraste avec l’expérience de « avant » qui suscite cette impression)…
Comme vous dites, j’ai eu l’impression de manger à un restaurant gastronomique d’un chef Français ou un Basque qui aurait voulu naître Japonais (un peu alla Thierry Marx). Certes je ne nie pas que tous les plats étaient bons mais la quantité était tellement aux antipodes de ce que la Paix représentait pour nous en termes de générosité ou de gargantuosité, qu’il nous était impossible de ne pas être déçus par l’expérience. Pour nous, ce n’est pas la Paix, ça… C’est comme si David Martin avait pris la Paix en otage, qu’il l’avait aliénée. Ok, on comprend qu’il avait envie de créer sa propre voie, mais pourquoi en nous privant de la Paix? 😀
Je suis un peu triste de ce constat… Fini les assiettes d’os à moelle cuits basse température, les cervelles de veau crème jaune d’oeuf, le Simmental de Bavière cuit au four Josper au charbon argentin et bois de Vigne, les super frites, et surtout ce fameux lard de poitrine de porc basque laqué à la japonaise fondant sur la langue… cette Dame blanche inoubliable… et le chef de salle en tablier noir qui crie « potje mayo pour la cinq!!! » vers la cuisine 😀
Difficile de trouver un équivalent à la Paix version brasserie sans tomber dans le succédané… Colonel? très cher, très huppé… Meet Meat? très ucclois et pas d’os à moelle :D… Vincent? j’ai été déçu la dernière fois… Chumadia? la quantité y est (c’est même pantagruélique) mais pas la finesse… Amadeus? trop touristique et franchement l’hygiène laisse à désirer… De Hoef? trop bourgeois :D… Holy Smoke? ce n’est pas inintéressant mais c’est de la viande fumée… Lettre pour Elise? il paraît qu’il faut connaitre le patron pour avoir les meilleurs morceaux de viande… La Quinca? cher, bruyant…
Certes tout ceci est subjectif… tous ces restos sont très bons en soi mais c’est en comparaison avec l’ex-brasserie de la Paix dont je parle 😉
Bien sûr il reste encore plein d’autres bonnes brasseries à Bruxelles (Vieux Saint Martin, Canterbury, Taverne du Passage, Aux armes, Georges, etc.) mais je ne suis pas super confiant d’y retrouver un jour ce qui faisait la magie de la Paix (brasserie) :-s
Bon, tout cela n’enlève évidemment rien à la qualité de la cuisine étoilée de David Martin, qui arrive à attirer du beau monde dans ce coin improbable d’Anderlecht (la dernière fois, il y avait Sang Hoon Degeimbre à la table d’à côté 😉 ). Par contre, le prix de ce king crab… euuuuh… Quand je vois le reportage sur Hong Kong (et le marché aux fruits de mer de Lei Yue Mun), ça me laisse songeur.
Je suis sûr qu’un chef comme David Martin serait tout à fait capable de tirer la quintessence de notre tourteau local (voire les étrilles) sans aller piquer les ressources des Norvégiens ou des Japonais 😀
okay, merci, j’y vais lundi prochain!
Vous me dirai si vous avez apprécié
Excellent article qui donne vraiment envie.
Merci Anonyme